En 1742, arriva à Aprey le premier peintre en faïence venu de Saint-Amand en Flandre : Jean-François Frossard pour le compte de Jacques Lallemant seigneur des lieux. Naquit ainsi la manufacture au grand feu dans le petit village d'Aprey, situé à une quinzaine de kilomètres de Langres. En 1760, Joseph Lallemant s'associa à son frère pour donner à l'entreprise un essor sans précédent. Sans délaisser les ustensiles communs, la faïencerie d'Aprey se tourna alors vers une production plus luxueuse au petit feu (cuisson de la peinture vers 4502 degrés permettant d'utiliser toute la gamme des oxydes métalliques) destinée à concurrencer les plus grands centres dont Strasbourg et Sceaux sur le marché parisien. De 1760 à 1763, un artiste exceptionnel, Protais Pidoux, a apporté sa contribution à la réussite de l'entreprise. Il égayait ses créations de scènes galantes et de paysages. Le magnifique légumier exposé à l'extrémité gauche de la première vitrine et surmonté d'un poisson est l'une de ses oeuvres. Les productions les plus courantes utilisaient les fleurs : pivoines, renoncules, marguerites, myosotis, mais aussi les oiseaux et les chinois.
A partir de 1769, François Ollivier (premier maire d'Aprey de 1790 à 1792) devint le directeur puis rapidement l'associé de Joseph Lallemant. Pour suivre au plus près le goût de la capitale, il demanda à des peintres d'exécuter des dessins qui lui étaient directement envoyés de Paris. La gamme des objets fabriqués devint très vaste : les plus courants, plats, assiettes, compotiers, et écuelles étaient moulés, tandis que les plus raffinés : cafetières, théières, pots à sucre, pots à oignons, coquetiers, rafraîchissoirs, jardinières... étaient tournés. La plus belle période concerne les années 1771-1780 avec la présence de huit peintres et non des moindre à Aprey.
Contrairement à celle de beaucoup d'autres manufactures, l'activité d'Aprey, s'est poursuivie pendant la période révolutionnaire et jusqu'en 1894. A partir de 1860, le retour du goût pour la faïence lui a donné un dernier éclat. Les entrepreneurs Léon puis Abel Girard, comprenant tout l'intérêt du phénomène, se lançèrent dans une production de copies de faïences fines du XVIIIe en utilisant les moules anciens. Après leur disparition, les faïenceries passent de main en main jusqu'à l'échec final de Eugène Mugnier. Aujourd'hui, pour découvrir ce patrimoine, vous pouvez vous rendre au Musée d'Art et d'Histoire de Langres qui comporte dans ses collections une exposition de pièces. Tous les grands musées de céramique du monde comporte des « Aprey » (musée Adrien Dubouché de Limoges, Arts décoratifs à Paris, musées de Sèvres).